décembre 19, 2018

Le projet de forçage génétique dirigé par Target Malaria n'informe pas les communautés locales des risques encourus: un nouveau court-métrage

Target Malaria est un consortium de recherche qui vise à éradiquer les espèces de moustiques porteuses du paludisme à travers des outils de modification génétique. Dans le cadre de cette expérience, ces outils n’ont pas fait l’objet d’un consentement de la part des communautés : c’est le message principal d’un nouveau court métrage qui sortira cette semaine. 
 
« Une question de consentement : les moustiques exterminateurs au Burkina Faso » présente des témoignages d’habitants des villages où les expérimentations ont lieu, ainsi que   l’opposition de groupes de la société civile de la région. 
 
Les révélations du documentaire sont problématiques pour le projet conduit par Target Malaria, lequel est soutenu par la Fondation Bill-et–Melinda Gates, Open Philanthropy Project ainsi que par les forces armées américaines.
 
En libérant des moustiques génétiquement modifiés, Target Malaria ouvre la voie àl’utilisation du forçage génétique, une technologie risquée qui a pour objectif l’élimination d’espèces entières. Des centaines d’organisations ont demandé un moratoire sur l’utilisation de cette technologie en dehors de laboratoires strictement contrôlés. 
 

« Une question de consentement » donne la voix à des habitants des villages où Target Malaria opère. Ces résidents expliquent qu’ils n’ont pas été informés du projet et de ses risques potentiels. 
 
Les témoignages de ces villageois viennent directement contredire les affirmations de Target Malaria qui prétend prioriser l’engagement des parties concernées s dans les communautés avec lesquelles l’organisme travaille. 
 
« Nous avons discuté avec plusieurs personnes issues des villages et quartiers visés au Burkina Faso et nous avons pu constater que les personnes dans ces régions affectées par les tests conduits par Target Malaria n’ont pas été mises au courant du projet ou s’inquiétaient des conséquences potentielles de ce projet. », affirme Zahra Moloo, journaliste et réalisatrice. 
 
« Nous savons que des moustiques sont capturés, mais on ne peut pas dire que nous avons été bien informés sur la nature du projet. » a affirmé un villageois de Bana, un des villages ciblés pour le lâcher de moustiques.
 
« Nous savons ce qui est arrivé avec Monsanto » , affirme un résident de Nasso, un village qui se trouve à 5 km d’un autre village ciblé pour le projet. « Ce qui est modifié laisse toujours des traces ». Ce n’est pas la première fois que le Burkina Faso se retrouve face aux OGMs : Monsanto a introduit du coton Bt génétiquement modifié en 2008, ce qui a mené à la production d'un coton de moindre qualité.
 
En novembre, la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique a fixé des conditions strictes pour la libération dans l'environnement d'organismes issus du forçage génétique. Ces conditions exigent au préalable que « le consentement libre et éclairé » ou « l’approbation et la participation des peuples autochtones et des communautés locales potentiellement affectées soient recherchés ou obtenus. » avant d’entreprendre des démarches. 
 
« Basé sur ce que nous avons vu jusqu’à maintenant, le travail que Target Malaria au Burkina Faso ne remplit pas les conditions de consentement énoncées par l’ONU. » affirme Silvia Ribeiro, directrice de la section Amérique Latine pour ETC Group. 
 
Le documentaire « Une question de consentement » montre des images d’une manifestation qui a eu lieu à Ouagadougou en juin 2018 et qui a réuni des personnes venant de différentes parties de l’Afrique de l’Ouest pour protester contre le projet de Target Malaria. 
 
« La meilleure manière de s’attaquer au paludisme reste la mise en place de bonnes politiques sanitaires pour nos lieux de vie et notre environnement. », affirme Ali Tapsoba de l’organisation Terre à vie, au Burkina Faso. « Tout comme d’autres activistes de par le monde, nous appelons à un moratoire sur le forçage génétique afin de permettre une meilleure compréhension de cet enjeu et ses conséquences dans le temps. »
 
« Une question de consentement : les moustiques exterminateurs du Burkina Faso » sera diffusé à Ouagadougou et Bamako le 27 Décembre.
 
À propos du forçage génétique
 
Le forçage génétique est une technologie qui corrige et modifie génétiquement des populations entières d'insectes, de plantes, d'animaux et d'autres organismes. 
 
Par exemple, Target Malaria a développé des forceurs génétiques qui se transmettront dans toute une population de moustiques rendant les femelles stériles, ce qui théoriquement amènerait à l’élimination de toutes les populations de moustiques qui s’accouplent avec des moustiques issus du forçage génétique ou de leurs descendants génétiques.
 
S’ils sont libérés à titre expérimental dans l'environnement, ces moustiques issus du forçage génétique pourraient transmettre leurs gènes modifiés à des espèces sauvages et domestiquées. Cela pourrait mener à la modification des systèmes écologiques et des réseaux alimentaires, nuire à la biodiversité et éradiquer des organismes utiles tels que les pollinisateurs.
 
Certaines compagnies ont déposé des brevets pour une utilisation commerciale du forçage génétique, y compris pour la manipulation du comportement des populations d'abeilles sauvages.
 
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