juillet 02, 2019

Le forcage génétique sous influence

un examen des données probantes sur les partis pris et les conflits d’intérêts dans le rapport de l’UICN sur la biologie synthétique et les organismes génétiquement forcés (gene-drive organisms)
première page du rapport

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Résumé exécutif

En mai 2019, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a publié une étude sur un domaine très controversé de la biotechnologie : la biologie synthétique. En passant en revue tous ceux qui se sont impliqués dans la rédaction de ce rapport, certains éléments suggèrent que la majorité des auteurs étaient déjà favorablement disposés à la biologie synthétique et au forçage génétique. En outre, plusieurs d’entre eux se trouvaient en situation de conflit d’intérêt, dont certains n’ont pas été déclarés en bonne et due forme à l’UICN à travers le Conflict of Interest Statement. Par conséquent, la crédibilité du rapport, lequel avance des éléments en faveur de la biologie synthétique et des organismes génétiquement forcés, s’en trouve remise en question. Cela s’explique par la présence de conflits d’intérêts et de partis pris chez les auteurs ainsi que par la composition asymétrique du groupe de travail. 
  • En septembre 2016, les membres de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ont adopté une résolution demandant à l’organisation d’entreprendre une évaluation des implications du domaine émergent de la biologie synthétique et en particulier des technologies dites de « forçage génétique », tout en s’abstenant de défendre ou de se prononcer ouvertement en faveur de cette technologie. 
  • Les membres de l’UICN auraient pu raisonnablement supposer que la direction de l’organisation adopterait une approche prudente et impartiale à l’égard d’une évaluation ayant des implications aussi importantes pour la biodiversité.
  • Cependant, l’UICN a choisi une voie différente, nommant un président bien connu pour son plaidoyer enthousiaste en faveur de cette technologie, soit Dr Kent Redford. 
  • M. Redford a nommé à son tour une cohorte composée de personnes dont les antécédents indiquent clairement qu’elles sont susceptibles d’adopter une attitude très positive à l’égard des technologies de «recherche génétique» et d’autres développements en biologie synthétique.
Ce document analyse les auteurs qui ont été choisis par UICN pour participer à ce groupe de travail sur les implications de la biologie synthétique, examinant les preuves de partis pris préexistants ainsi que d’autres éléments qui pourraient être perçus comme des conflits d’intérêts. Les principales conclusions sont les suivantes :
 
  • Sur la quarantaine de personnes associées au rapport, plus de la moitié présentent des preuves d’un parti pris préexistant en faveur de la technologie mise è l’étude ou d’un conflit d’intérêts potentiel. En revanche, personne n’a démontré un biais positif dans la mise en œuvre d’un bilan critique de la biologie synthétique. La composition du groupe de travail est donc extrêmement déséquilibrée.
  • Trois groupes d’intérêt en biologie pro-synthétique semblent avoir eu une influence disproportionnée sur la rédaction de ce rapport : au moins 15 membres du groupe seraient associés ou employés soit par Revive and Restore, soit par le projet Genetic Biocontrol of Invasive Rodents Project (GBIRd) ou encore par Target Malaria. Ces trois organismes comptent parmi les plus importants et les mieux financés au monde pour leur mise au point et le déploiement d’organismes génétiquement modifiés en vue de leur dissémination dans l’environnement.
  • Bien que la décision de l’UICN mentionne explicitement le besoin d’impliquer des documents collaboratifs et des réseaux de groupes de la société civile qui suivent les développements de la biologie synthétique dans le groupe de travail, il semble que ces réseaux n’aient pas été invités à participer.
  • Plusieurs membres du groupe d’évaluation ont omis de divulguer des éléments pertinents qui pourraient être perçus comme des conflits d’intérêts potentiels. Il s’agit notamment du président Kent Redford, qui n’a pas fait état de ses services de consultance et d’associations antérieures avec Dupont et Revive and Restore.
  • En 2017, une douzaine de membres du groupe ont été impliqués dans un effort délibéré pour influencer clandestinement le Forum ouvert en ligne sur la biologie synthétique mis en place par la Convention des Nations Unies sur la biodiversité et coordonné par Emerging Ag Inc - une société de relations publiques financée par et pour le secteur agroalimentaire. Il s’agit notamment du président Kent Redford, qui donne l’impression d’avoir suivi activement les instructions du personnel de cette société de relations publiques sur ce qu’il faut afficher (voir annexe B).